La prochaine visioconférence-débat de l’Association Tarnaise de Gérontologie (ATG) aura lieu le mardi 10 décembre 2024 de 18 heures à 20 heures
Elle portera sur le thème suivant :
Représentations de la déchéance : les personnes âgées et la culture du déchet
Par Claire Larroque, philosophe, albigeoise d’origine.
S’inscrire en ligne et poser des questions ou émettre des remarques écrites à l’adresse ci-dessous, l’adresse Zoom vous sera communiquée après inscription.
https://forms.gle/zgXFU7J1AX6EBzjS6
Elle vient de faire paraître l’ouvrage suivant aux éditions des puf :
Elle nous écrit :
Lors de l’audience générale du 1er juin 2022, place Saint-Pierre de Rome, le pape François a poursuivi son cycle de catéchèses consacré à la vieillesse. Il a notamment dénoncé le fait que notre civilisation promeut « l’idée que les personnes âgées sont du matériel de déchèterie, que les personnes âgées doivent être mises au rebut ». En dressant un tel parallèle, non seulement le pape François met en avant un processus de réification des personnes âgées (des êtres humains sont considérés comme des objets) mais il considère que cette chosification engendre un geste supplémentaire de rejet et d’exclusion, identifiant les vieux à des déchets. Les personnes âgées non seulement ne seraient plus humaines mais elles seraient des choses dont il faut se débarrasser. La philosophe Simone de Beauvoir, dans les années 1970, dressait déjà un constat similaire :
Que pendant les quinze ou vingt dernières années de sa vie un homme ne soit plus qu’un laissé pour compte, cela manifeste de l’échec de notre civilisation : cette évidence nous prendrait à la gorge si nous considérions les vieillards comme des hommes, ayant une vie d’homme derrière eux, et non comme des cadavres ambulants. (Simone de Beauvoir, La Vieillesse).
Comment comprendre un tel rejet des personnes âgées ? Pourquoi de tels mécanismes de réification se mettent en place ? De quoi notre dégoût de la vieillesse, apparentée à une forme de déchéance, est-il le symbole ?
Lors de mon intervention, il s’agira, dans un premier temps, de montrer que dans nos sociétés de surconsommation et de surproduction qui privilégient le neuf et le clinquant, les objets mais aussi les personnes qui sont considérées comme inutiles car atteintes par une forme de fragilité voire de déchéance (morale ou physique) vont être facilement invisibilisés et rejetés hors de notre monde social : im-mondes. Cette assignation des personnes âgées à ces catégories de l’immonde et de l’abject façonne des attitudes vis-à-vis d’elles mais édifie aussi tout un système de prise en charge conditionné par cette vision. Il pourra alors être intéressant, dans un second temps, de voir comment la modification de notre conception du déchet (et de la déchéance) pourrait entraîner un changement de notre rapport à la vieillesse et aux vieux. Une telle analyse ne pourra faire l’économie d’une réflexion sur la façon dont nos sociétés témoignent d’une volonté féroce de de bannir la mort et ce qui peut la symboliser. Cela permettra, dans un troisième temps, de montrer pour quelles raisons il semble nécessaire de substituer à l’ontologie moderne, focalisée sur « l’être vers la mort » (Augustin Berque), une ontologie reconnaissant « l’être vers la vie » qui se représente la mort comme partie intégrante de la vie et abandonne la poursuite du rêve d’être infaillible si prégnant dans nos vies actuelles.