Sophia Brahe est née en Scanie, province alors danoise devenue depuis suédoise. Dernière née d’une famille de huit (ou dix) enfants, dont le père était conseiller du Roi du Danemark* et la mère proche de la cour de le reine. D’origine noble, elle a pu recevoir une éducation privée, lors de laquelle elle apprend l’allemand et la littérature classique. Son frère aîné, Tycho Brahe, deviendra un brillant astronome**, et influence sans doute son intérêt pour l’observation du ciel, notamment lors de l’éclipse de lune de décembre 1573.
Initiée à la chimie et à l’horticulture par son frère Tycho, provoquant ainsi une tension au sein de la famille qui estimait qu’étudier les Sciences était une perte de temps pour des gens de la noblesse et les aurait préférés à la cour du roi.
En 1579, elle épouse un homme plus âgé qu’elle d’une dizaine d’années, très riche et issu d’une famille noble lui aussi. Le couple aura un enfant l’année suivant le mariage.
Neuf ans plus tard, elle se retrouve veuve et en profite pour poursuivre son apprentissage de l’astronomie grâce à des livres en latin et en allemand, langues qu’elle savait lire. Astronome autodidacte, elle met à profit son temps libre pour passer plus de temps auprès de son frère à étudier le ciel, l’assistant dans ses recherches, effectuant des mesures astronomiques qui deviendront la base des prévisions modernes de l’orbite des planètes. Elle se consacre tout autant à l’astronomie, à l’astrologie (créant des horoscopes) qu’à l’horticulture en gérant à sa guise le jardin du domaine familial (devenu héritage de son fils) dans un style Renaissance. Son jardin devient rapidement le plus renommé et le plus visité de Scandinavie.
En rendant visite à son frère dans son Observatoire, elle fait la connaissance d’un ami de la famille, Erik Lange, avec qui elle se lie de sympathie. Assez rapidement elle en devient amoureuse. Elle s’intéresse dès lors à la passion de son nouvel amant, l’alchimie. Voulant transformer le plomb en or, il ne parvint qu’à changer son argent en courant d’air ! Endetté par des travaux illusoires, il se retrouve rapidement en difficulté auprès de créanciers qui lui courent après ! Le couple s’installe un temps en Allemagne, où Tage, le fils de Sophia, entreprend des études dès 1599. En 1613, son second mari décède, elle rentre alors au Danemark pour s’occuper de la gestion du patrimoine de son fils, seul héritier de son premier époux.
En plus du jardin, elle installe un laboratoire de chimie dans lequel elle tente de réaliser des médicaments, à partir de poisons***, qu’elle met à disposition de sa famille mais aussi des pauvres qui peuvent difficilement se soigner****.
Elle entreprend des recherches généalogiques et publie, en 1626, une généalogie des familles Nobles scandinaves (de plus de 900 pages).
Elle s’éteint à l’âge de 87 ans et sera enterrée avec son premier époux.
Son frère la surnommait « Animus invictus », « l’âme invaincue » en latin ! Car il en faut de la ténacité pour affronter les préjugés et se faire une place dans le monde scientifique quand on est une femme…
Les filières scientifiques ont longtemps été réservées aux seuls hommes. Il fallut aux femmes pionnières dans ses carrières là beaucoup de courage (et de moyens financiers) pour s’imposer. La quasi-interdiction faite aux filles de choisir des métiers scientifiques les ont cantonné dans d’autres voies. Se qui permettait de prétendre leur désintérêt pour ces métiers là. Suite à des recherches sur la désaffection des filles pour les filières scientifiques, un groupe de femmes scientifiques, réunies autour de Huguette Delavault, fondent en 2000 l’association « Femmes & Sciences »******.
Contrairement à des légendes tenaces, les femmes aussi peuvent s’épanouir en étudiant et pratiquant les Sciences ! Si on n’entrave pas leurs études et leurs expérimentations…
Patrice K
* Du roi Frédéric II de Danemark.
** En 1572, il découvre une super nova qu’il nomme « Nova Stella » et obtient une renommée internationale dans le milieu de l’astronomie. En 1576, le roi Frédéric II de Danemark lui offre une île (l’île Ven) sur laquelle il put faire construire deux châteaux équipés d’un observatoire chacun. On dit que 2% du budget du royaume lui furent alloués (jusqu’en 1596 où le nouveau roi Christian IV coupa les vivres) !
*** Suivant les travaux du médecin-philosophe-théologien allemand Paracelse Philippus Theophrastus Aureolus Bombastus von Hohenheim (1493-1541)
**** Le peintre Pieter van der Hulst a rencontré un très vieille dame nommée Live Larsdatter, dont il a peint un portrait (en 1691), qui affirmait avoir travaillée pour Tycho et Sophia Brahe. Elle disait que Sophie Brahe lui avait enseigné la pharmacopée, ce qui lui aurait permis de vivre jusqu’à 123 ans !
***** L’association « Femmes et Sciences » s’est donnée, entre autres missions, de promouvoir l’image de la science chez les femmes et l’image des femmes dans les sciences et d’inciter les jeunes filles à s’engager dans des carrières scientifiques et techniques.