Relevé des discussions sur les ZAD lors du salon du livre libertaire et des Alternatives (LIBERTARN) du dimanche 2 juin 2013 à Gaillac
Echange animé par l’Altermondialiste. . .
(Publié le vendredi 5 juillet 2013, sur le blog des Alternatifs du Tarn)
Intervenant-e-s :
– Patrice K pour le collectif des « Faucheurs & Faucheuses Volontaires d’OGM » ;
– Françoise B pour le « Collectif de défense de la zone humide du Testet » ;
– Marylise S-J pour l’association « Antennes 81 » ;
– Jean F pour le collectif « Alternatives à l’Autoroute Castres-Toulouse » ;
– Georges N pour le « collectif Notre Dame Des Landes 81 » ;
– Wil pour Radio Albigès et L’Altermondialiste.
Présentation du sujet :
– L’Altermondialiste : Pour nous, les ZAD ce sont les Zones à Défendre, mais pour les bétonneurs, ce sont les Zones d’Aménagement Différé. Les ZAD sont des lieux de vie, de biodiversité, de forêt, de productions agricoles, de zones humides… dont les acteurs du système qui nous broie, qui nous exploite, cherchent à s’approprier en les déstructurant et les réaménageant selon leurs idées, leurs intérêts et surtout pour leurs profits.
Ici dans le Tarn, comme partout ailleurs, des projets destructeurs voient le jour. Qu’ils soient des projets des aménageurs publics ou de multinationales privées, ils ont des points communs : tous méprisent la biodiversité, la vie qui s’y est développée, ils méprisent les liens sociaux et culturels qui s’y sont tissés depuis des siècles. Si ils voient le jour, ils impacteront durablement les sites sur lesquels ils veulent s’implanter et même au-delà de ces sites, en participant à la domination totalisante d’un système qui conçoit tout l’espace comme susceptible de lui être profitable.
Parmi les collectifs n’ayant pas pu participer à cette table ronde, nous avions invité le collectif « Faut pas pucer ». Pour moi, la ZAD du collectif « Faut pas Pucer » n’est pas une zone géographique, mais une « zone anthropologique ». En s’opposant à la généralisation du puçage sur les animaux d’élevage, et à terme, sur celui, probable des humains ; en s’opposant à l’utilisation massive de la puce RFID, ce collectif alerte sur une des méthodes d’appropriation et de contrôle global en cours. Parmi les éleveurs membres du collectif « Faut pas pucer », certains refusent les contrôles des services administratifs. Ils risquent donc de passer en procès pour cet acte de désobéissance. Le soutien du plus grand nombre sera important.
Maintenant passons à la présentation du collectif des Faucheurs Volontaires d’OGM.
– Patrice K : les objectifs principaux des Faucheurs & Faucheuses Volontaires d’OGM sont d’alerter l’opinion publique, d’empêcher la présence de plantes génétiquement modifiées dans l’agriculture et l’alimentation (qu’elle soit humaine ou animale), notamment dans les champs. Puisque alerter ne suffit pas, les citoyens et citoyennes composant ce collectif ont choisi de détruire ces plantes afin d’éviter la propagation de gènes non naturellement présents dans ces organismes. Un autre des objectifs du collectif est de s’opposer à la brevetabilité des semences et du vivant.
– L’Altermondialiste : est-ce que le collectif a des victoires à son actif ?
– Patrice K : on peut considérer que le moratoire sur le maïs Monsanto bt 810 est une victoire liée aux actions des Faucheurs & Faucheuses d’OGM. Mais la victoire principale est la médiatisation de l’existence de plantes génétiquement modifiées et des projets nocifs de l’industrie semencière.
– L’Altermondialiste : En quelle année a été créé le collectif des FV d’OGM ?
– Patrice K : le collectif a été créé en 2003, suite à un rassemblement sur le Larzac. Notamment après des premiers fauchages d’OGM (Ariège…) et les premiers procès. Le collectif permet d’aller au-delà des actions de la Confédération Paysanne, en fédérant autour de la thématique des OGM toutes celles et tous ceux qui se sentent concernés par la dangerosité des OGM. Nous fêtons donc cette année les 10 ans du collectif. Des rencontres internationales sont organisées à Bouzy la Forêt dans le Loiret les 20 et 21 juillet à l’occasion des 10 ans du collectif !
– L’Altermondialiste : Quelle est l’actualité des FV d’OGM ?
– Patrice K : des procès encore et encore ! L’internationalisation du mouvement des faucheurs et des libérateurs de champs ! L’actualité encore c’est d’informer, de traquer et d’éradiquer ces nouvelles chimères que sont les plantes « mutées », notamment des colzas, des tournesols (de chez BASF et Pioneer)… les pommes de terre Amflora, des arbres (bouleaux, eucalyptus…). Donc de la vigilance encore et toujours.
– L’Altermondialiste : passons maintenant au collectif de Sauvegarde de la zone humide du Testet. Françoise, peux-tu nous rappeler l’histoire de ce collectif ?
– Françoise B : fin 2010, nous apprenons qu’un projet de barrage dans la forêt de Sivens a failli faire l’objet d’une enquête publique. Immédiatement, nous sommes un certain nombre à vouloir en savoir plus en réclamant des documents, pour étudier le dossier pour pouvoir émettre un avis, une position. Ce projet est porté par le Conseil général du Tarn, qui, en 2007, avait donné une concession d’aménagement public à la CACG (Compagnie d’Aménagement des Coteaux de Gascogne) ; de ce fait le Conseil Général affirmait ne pouvoir nous remettre de documents car le projet appartenait désormais à la CACG ! Nous avons donc fait des recherches au sein de nos réseaux, sur Internet… nous nous apercevons alors que l’enjeu se situe au niveau de Midi Pyrénées, à savoir, quelle agriculture va se développer, ou continue de se développer, car cette retenue d’eau collinaire a pour but essentiel (70 %) l’irrigation intensive (2000 m3/ha). Mais les porteurs du projet estiment que c’est pour le soutien au débit d’étiage de la Garonne ! Il existe actuellement 185 retenues collinaires sur le bassin versant. Un des buts de la retenue d’eau est de maintenir de la vie dans le Tescou au cas où il soit asséché, mais ce n’est qu’un prétexte ! Début 2011, un collectif se créait sous l’impulsion de l’association Lisle Environnement (basée à Lisle/Tarn). En juillet 2012, on apprend que le projet va être mis en enquête publique. On pourrait alors avoir un dossier à étudier, puis critiquer. Un collectif d’associations se forme alors regroupant Lisle Environnement, le CEPRA de Rabastens, Nature & Progrès 81, ATTAC 81, l’association Vallée du Gijou, SDN 81 + des citoyens réunit en collège citoyen ce qui leur donne le même poids qu’une association au sein du collectif. Le but de ce collectif était de participer à des débats contradictoires à partir des dossiers. Ce qui n’a jamais eu lieu ! L’objet étant de sauvegarder la zone humide du Testet en tête de bassin du Tescou pour promouvoir la restauration et la réhabilitation de l’ancienne zone humide et valoriser la vitalité écologique et la continuité écologique de la rivière et du bassin. Au-delà de la défense de la zone humide, nous voulions prendre en compte tout le cours d’eau. Le collectif défend l’idée d’une gestion partagée de l’eau du bassin adaptée à la ressource disponible et non destructrice des écosystèmes. Le collectif se place dans une logique de développement durable, c’est-à-dire d’une économie respectueuse de l’environnement et socialement équitable dans une démarche d’intérêt général. Le but est d’associer toutes les couches de la population, pas seulement les agriculteurs ! La population locale (hors population agricole) n’est ni informée ni consultée.
– L’Altermondialiste : Quelle est l’actualité de votre collectif ?
– Françoise B : nous avons participé à l’Enquête publique de septembre à début octobre 2012. La commission d’enquête a donné un avis favorable sous réserve d’avoir un avis favorable du Comité National pour la Protection de la Nature. Le CNPN a donné un avis défavorable en avril 2013. Le Conseil Régional Scientifique pour la Protection du Patrimoine Naturel (CRSPN) avait donné, quant à eux, un avis défavorable en décembre 2012. Le Conseil Général du Tarn a voté en catimini (le 17 mai 2013), en commission permanente, sans que le sujet soit à l’ordre du jour, la demande de déclaration d’intérêt général et d’utilité publique. Les élu-e-s PCF ont refusé de participer à ce vote. La préfète a invité le collectif de Sauvegarde de la zone humide du Testet, l’association Vie au Tescou (qui regroupe des partisans du projet de retenue d’eau, essentiellement des exploitants agricoles), la chambre d’agriculture à une réunion d’échanges. Devant le déséquilibre, nous voulions que la fédération de pêche (très critique sur le bénéfice écologique du barrage) soit présente aussi. Mais cette réunion a été annulée ! Le préfet de région a demandé à Delphine Batho (ministre de l’environnement) de statuer sur ce projet, et de donner un avis par rapport à celui de la CNPN rendu en avril 2013. On verra ce que prendra comme décision la préfète du Tarn. Mais nous sommes décidés à aller jusqu’au bout des recours juridiques.
– L’Altermondialiste : Avez-vous enregistré des victoires ?
– Françoise B : dans les mobilisations, comme en octobre 2011, où nous nous sommes retrouvées + de 200 personnes mobilisées sur la zone humide. Nous avons su populariser le sujet de retenue d’eau (même des médias télé étaient présents). Une autre victoire, lors de l’enquête publique liée à la modification du PLU où le commissaire enquêteur nous donne raison, en préconisant à la municipalité de ne pas déclasser les bois ! La participation massive à l’enquête publique sur le projet lui-même est aussi une forme de victoire. Bien que toutes les questions posées lors de l’enquête n’ont pas obtenu de réponse de la part de la CACG.
– L’Altermondialiste : et des défaites ?
– Françoise B : l’avis favorable de la commission d’enquête est une défaite pour nous. Continuer à faire du maïs irrigué avec une évapotranspiration importante alors qu’on parle de réchauffement climatique est une aberration ! Si il y a de l’argent à investir, alors c’est l’occasion d’aider les agriculteurs à amorcer le virage des économies d’énergies, à mettre les 185 retenues collinaires en conformité avec la loi (la France court le risque d’être mise à l’amende).
– L’Altermondialiste : Quels sont les espoirs de ton collectif ?
– Françoise B : continuer à convaincre que ce projet est nuisible, continuer à mobiliser. Ce projet s’inscrit dans les projets inutiles et imposés ! Commencer à fédérer sur ce qui rassemble les collectifs opposés aux projets inutiles, à savoir, s’opposer à une logique économique inadaptée ! Et aller sur le terrain des alternatives !
– L’Altermondialiste : et quelles stratégies pour mener à bien vos espoirs ?
– Françoise B : En menant des actions politiques, des actions citoyennes et des actions juridiques !
– L’Altermondialiste : Merci Françoise.
Bonjour Marylise. Peux-tu nous présenter l’Association Antennes 81.
– Marylise S-J : je représente le collectif Antenne de Rivières et l’Association Antennes 81. Le collectif Antenne de Rivières s’est créé en mai 2010 lorsque la commune et la population de Rivières ont été mises devant le fait accompli de l’installation d’une antenne relais de téléphonie mobile. Plus récemment nous avons fondé le collectif Antennes 81 qui regroupe différentes associations et collectifs du Tarn (tels Robins des Toits 81, le collectif de riverains des antennes relais de Castres, la CEPRA de Rabastens…). Le collectif a pour but d’informer les populations sur les risques des ondes électromagnétiques et de responsabiliser les élu-e-s sur les dangers sanitaires. De nombreuses études de scientifiques indépendants montrent un réel danger des ondes et préconisent un plafond à ne pas dépasser de 0,6 volts/mètre (voire 0,2 v/m comme le préconise le Conseil de l’Europe), sachant qu’en France, nous sommes actuellement à 61 v/m, soit 100 fois plus ! Un autre but du collectif est d’œuvrer pour que les citoyens et les élu-e-s aient leur mot à dire sur les implantations des antennes, car les maires n’ont plus compétence pour décider ou refuser de l’implantation d’une antenne sur leur commune !
– L’Altermondialiste : quelles sont les actions que mènent votre collectif ?
– Marylise S-J : initialement le collectif Antenne de Rivières menait des actions d’informations auprès des habitants de Rivières, auprès des personnels politiques locaux (maires des communes alentours, des conseillers généraux, le président de la communauté Tarn & Dadou, le Congrès des maires). La mairie de Rivières a voté une motion pour l’installation d’antennes ne dépassant pas 0,6 v/m, envisageant d’aller progressivement vers des antennes ne dépassant pas 0,2 v/m ; cette motion a aussi été voté par des communes voisines (Brens, Gaillac, Giroussens, Briatexte, St Benoît de Carmaux). Le collectif a ensuite tenu des stands d’informations sur des marchés de plein vent, en recueillant des signatures pour une lettre destinée à la ministre de la santé Marisol Touraine. Nous avons co-organisé, avec Robins des Toits, des réunions publiques. Nous distribuons dans les boites aux lettres régulièrement des conseils de protection et des informations. Nous avons aussi écrit aux député-e-s et sénateurs pour appuyer la proposition de loi de Laurence Abeille relative à l’application du principe de précaution aux risques résultant des ondes électromagnétiques. Ensuite, nous essayons de mettre en place une « veille onde », notamment par l’élaboration d’une convention avec le maire de Couffouleux, pour l’utilisation de l’appareil de mesure d’ondes qui a été délivré à la mairie de Couffouleux par le gouvernement dans le cadre du « Grenelle des Ondes ».
– L’Altermondialiste : Avez-vous enregistré des victoires ? Des défaites ?
– Marylise S-J : la mairie de Rivières, quand elle a pris connaissance du projet d’implantation d’une antenne relais, a refusé cette implantation. Elle a été mise au tribunal par SFR qui a gagné ! La c’est une défaite ! Pas trop de victoires encore. Sauf que nous rencontrons de plus en plus de collectifs, on essaie de se regrouper… Nous sommes assez pessimistes, car les antennes « 4 G » arrivent (pour les smartphones…), elles sont encore plus puissantes ! Ça nous semble très compliqué de réclamer des seuils très bas d’émissions d’ondes.
– Daniel : le combat est très difficile. Dans ce domaine (comme dans le cas du projet sur le Tescou) c’est le pognon qui domine la situation. Nous avons envoyé beaucoup de lettres aux parlementaires. Nous avons bien reçu quelques réponses polies, mais ils n’osent pas trop s’attaquer aux intérêts privés… Par exemple, le président d’un Conseil Général qui est PDG d’une société d’économie mixte qui installe la wifi. Alors… entre gens du même bord, on ne se fait pas trop d’oppositions ! Nos démarches auprès des politiciens n’amènent pas de grands changements, en fait.
– L’Altermondialiste : pour le collectif des Alternatives à l’Autoroute Catsres-Toulouse, Jean, peux-tu nous remettre dans le contexte ?
– Jean F : le projet de Liaison Autoroutière Castres-Toulouse remonte aux années 1980’. Il réapparaît vers 2005. Des associations et collectifs s’opposent alors à ce projet. Un des plus anciens collectifs est certainement la Coulée verte (qui œuvre autour de Sémalens, Castres). Début 2007, plusieurs associations décident de se regrouper et forment le collectif RN 126. Commencent alors un travail d’éducation populaire, un travail d’expertise en étudiant les dossiers (afin de prouver l’inutilité et les coûts du projet !) et un travail de lobbying. Avec un début de structuration lors du débat public du grand contournement de Toulouse et un gros travail des collectifs et associations lors du Débat Public de 2009/2010. Au cours de ce débat public, n’a pas été posé le sujet des alternatives à l’autoroute, ce que de nombreuses associations et certains groupes politiques réclamaient. N’a été étudié que le projet de la DREAL, c’est-à-dire un projet de liaison autoroutière 2×2 voies entre Castres et Toulouse concédée à un opérateur privé, car l’argent public ne permet pas de réaliser et de gérer cet ouvrage ! Le résultat du débat public était prévisible : le projet de la DREAL a été retenu ! C’est alors que le collectif RN 126 s’est élargi pour devenir un collectif pour les Alternatives à l’autoroute. Dans lequel on retrouve des associations (Lauragais sans autoroute, la Coulée Verte…), des agriculteurs (Confédération Paysanne et même des agriculteurs syndiqués à la FDSEA), des groupes politiques (le PS de la Haute Garonne, EELV 31 et 81, Les Alternatifs 31 et 81, le NPA 31 et 81, le POI 31, le groupe ELAF-FA, le Parti de Gauche) et quelques syndicats (SUD, FSU, la Confédération Paysanne, la CGT Chômeur 81)… à savoir que la majorité des syndicats est pour le projet d’autoroute.
Pour certains, les élections présidentielles et législatives de 2012 étaient une promesse de changement ! Certain-e-s candidat-e-s ont fait des promesses. Et certain-e-s d’eux ont été élu-e-s ! Je pense à Linda Gourjade, députée PS du sud du Tarn. Dans certains discours on pouvait noter des ambiguïtés sur la volonté de préférer une 2×2 voies gratuite à l’autoroute. Actuellement, le gouvernement a mis en place une commission « Mobilité 21 » qui doit examiner un certain nombre de projets (infrastructures routières, ferroviaire…), et les classer en fonction de leur faisabilité et de la nécessité de les réaliser rapidement. Cette commission doit rendre son avis fin juin 2013. Mais on peut espérer que le projet d’autoroute Castres-Toulouse soit repoussé à 2030 ! On note qu’actuellement les « pro-autoroute » font le forcing pour ne pas qu’on les oublie !
– L’Altermondialiste : l’actualité du collectif ?
– Jean F : RN 126 estime être arrivé au bout de son travail d’expertise, et qu’il est temps que des mouvement politiques portent les revendications des alternatives à l’autoroute. EELV 81, Les Alternatifs 81, le NPA du vaurais, le POI, le Parti de Gauche et le PCF 81 ont décidé de commencer à travailler ensemble avec les associations qui le souhaiteraient avant même les résultats de la commission « Mobilité 21 ». Notamment pour envisager les solutions alternatives à mettre en débat (aménagement et sécurisation de la RN 126, réflexions sur les aménagements possibles pour l’entrée de Castres, amélioration du service ferroviaire, développement et amélioration du service des transports en commun, quel développement économique du sud du Tarn…). Il faut encore insister sur les dégâts écologiques que causeraient ces travaux. Continuer à dénoncer les Partenariats Public-Privé (le public paient les travaux, le privé empochent les bénéfices ! Et si il n’y a pas suffisamment de bénéfices le privé demande des subventions d’équilibre aux collectivités territoriales !)
– L’Altermondialiste : passons maintenant au collectif Notre Dame des Landes 81. Bonjour Georges.
– Georges N : le collectif Notre Dame des Landes 81 participe à la lutte contre un aéroport, ce grand projet inutile qui veut s’imposer à Notre Dame des Landes (au nord de Nantes). Le collectif s’est fondé en novembre 2012 à Castres. Nous sommes partis très fort, mais nous constatons une baisse de fréquentation. J’espère que les membres ne pensent pas que c’est gagné d’avance ! Parmi nos actions principales : sensibiliser les populations à la problématique de ce projet, organiser des conférences-débats et des projections de films documentaires, réaliser de tracts, des banderoles… Par exemple, sur Albi, nous avons déployés de grandes banderoles pour appeler les gens à se rendre à Notre Dame des Landes pour la chaîne humaine du 11 mai, et nous avons aussi co-organiser un départ en bus vers Notre Dame des Landes pour cette occasion. Nous essayons de mettre en évidence les dangers de ce projet (écologiques, sociaux…), les coûts, l’inutilité de ce projet.
– L’Altermondialiste : le collectif a-t-il des victoires et/ou des défaites à son actif ?
– Georges N : la première victoire a été de constituer ce collectif ici dans le Tarn ! Une seconde victoire : les liens que nous créons ici et notamment lors du passage des marcheurs de Nice à Notre Dame des Landes que nous avons fait venir à Gaillac lorsqu’ils étaient à Toulouse (par train), en lien avec le collectif de défense de la zone humide du Testet. La mobilisation d’une quinzaine de tarnais-e-s le 11 mai à Notre Dame des Landes est aussi une victoire du collectif.
– L’Altermondialiste : vos projets immédiats ?
– Georges N : nous allons diffuser, en partenariat avec le collectif SDN 81, le film documentaire « Plogoff, des pierres face aux fusils », sur la grande lutte victorieuse de Plogoff où les habitants ont refusé la construction d’une centrale nucléaire. Lutte victorieuse. Rapidement on comprend l’intérêt de diffuser ce film dans le cadre de la lutte contre le projet d’aéroport de Notre Dame des landes !
– Danièle W : ce qui est intéressant à noter c’est la globalité de nos luttes. Nous retrouvons dans tous ces collectifs des gens qui luttent pour la défense de la nature et des humains. Ça me rappelle la lutte du Larzac. Il me semble important de coordonner nos luttes.
– Jean F : le collectif Notre Dame des Landes 81 est aussi disponible pour projeter des films documentaires en liens avec des collectifs de défense ou de lutte contre un projet, afin de lier les luttes entre elles.
– L’Altermondialiste : des présentations de ces collectifs, peut-on faire ressortir l’intérêt de mutualiser les forces, les moyens d’actions, les stratégies d’actions ? Sommes-nous à même d’analyser quelles sont les actions qui ont fait preuve d’efficacité ? Quels sont les moyens d’action qui ont le plus d’impact, qui présentent le plus d’intérêt ? Quelles sont les stratégies les plus efficaces ? Comment les victoires ont-elles été obtenues ? Quelles sont les actions qui n’ont mené à rien (pour l’instant) ? Répondre à ces questions permettrait peut être d’éviter aux collectifs de perdre du temps dans des actions qui ne donnent pas satisfaction.
– Françoise B : l’idée de marche semble efficace. Peut-être pourrions nous organiser une marche qui relie toutes les zones à défendre reliant ainsi tous les collectifs, toutes les luttes dans le Tarn. Cette marche pourrait mettre en avant une lutte différente chaque jour. C’est vrai que faire en marchant demande de la disponibilité, mais lors de ces marches militantes il se créait beaucoup de liens. C’est une expérience très riche. La dimension de l’accueil des marcheurs est importante, avec soupe populaire, convergence… Une marche c’est une dynamique.
– Marylise S-J : la question que je me pose est de savoir si nous n’allons pas de nouveau rester entre nous, entre collectifs. Comment faire pour amener des gens de l’extérieur ? Comment informer les gens non encore sensibilisés ?
– Georges N : nous avons laissé 1 banderole dans un jardin (appartenant à un couple membre du collectif NDDL 81) qui donne sur la rue en plein centre d’Albi. C’est assez visible, des gens s’arrêtent, se questionnent.
– Jean F : aucun moyen n’est à négliger. Une réunion d’information, la distribution de tracts… ça nous permet de discuter avec des gens. Il faut nous attendre à des réactions irrationnelles telles que « vous êtes contre le progrès ! ». Pour cela il faut être en capacité de proposer certaines alternatives aux projets contre lesquels nous sommes. C’est souvent un combat de longue date. D’autant qu’en face, nous avons une hydre qui possède presque tous les médias !
– Stéphane P : les lettres aux parlementaires ont aussi un impact. Certains d’entre eux posent des questions aux gouvernements. Nos réseaux n’ont pas la force des médias. Il faut être dans les réseaux pour savoir qu’il y a tel ou tel évènement, telle action. Il nous manque les médias qui diffusent nos actions, nos rendez-vous.
– Daniel : les élu-e-s se bougent, et de façon très relative, souvent en fonction de leurs propres intérêts ! Antennes 81 diffusent une feuille d’info mensuelle par Internet. Je suis souvent tenté d’y diffuser des infos sur les autres luttes. Il serait intéressant de créer une feuille d’info par Internet regroupant une ou deux infos de chaque collectif.
– Georges N : le Tarn Infos Citoyen joue un peu ce rôle pour les évènements dans le Tarn.
– Patrice K : et les médias indépendants, comme Confluences 81 et l’Altermondialiste rencontrent des difficultés financières…
– Jean F : sans pub, c’est très difficile de faire vivre un média papier. Il faut éviter de tomber dans le piège de multiplier le nombre de médias locaux alternatifs. Mais une feuille d’infos Internet avec 1 info importante par collectif semble une bonne idée.
– L’Altermondialiste : l’idée de Françoise de faire une marche, vous semble-t-elle une idée pertinente ? Nous pourrions par exemple relier les collectifs en passant sur les lieux de lutte. Par exemple en partant de Puylaurens contre le projet d’Autoroute Castres-Toulouse, en continuant sur Lavaur contre les OGM, par Ambres, contre les projets de gravières, en allant à St Sulpice contre le projet des Portes du Tarn, puis vers la forêt de Sivens contre le projet de retenue d’eau sur le Tescou, par Gaillac sur le thème des monnaies locales, par Rivières contre les projets d’antennes relais de téléphonie mobile, par Albi avec les villes en Transition, par Alban contre les boues de centrales d’épuration, par St Pierre de Trivisy en soutien avec des éleveurs opposés au puçage, par Montredon Labessonié contre les pesticides, par Réalmont pour le collectif 81 Notre Dame des Landes… ça fait un joli tour des ZAD !
– Stéphane P : l’idée est intéressante. Mais nous sommes tous très pris ! Espérant que ça réunisse de nouvelles personnes qui se mobilisent pour organiser cette marche !
– Wil C : ce type d’évènement est important pour tisser des liens. On apprend à mieux se connaître. À se faire confiance. La place de l’argent et donc du temps que nous perdons à travailler pour en gagner est centrale. D’où l’intérêt de réfléchir aussi aux monnaies sociales, locales…
– Jean F : je ne sais pas si au sein de nos collectifs respectifs tous les membres ont la même compréhension que nous de la globalité des luttes.
– Patrice K : je prends l’exemple des problématiques liées aux antennes relais de téléphonie mobile. Nous vivons dans une schizophrénie hypocrite. Nous sommes presque toutes et tous opposé-e-s d’avoir une antenne à proximité de chez soi ou de l’école de nos enfants. Mais la plupart de nos contemporains ont des téléphones portables dans la poche (moi le premier !), dont certains captent Internet et demandent donc encore plus de puissance de la part des antennes. Les vieux téléphones portables nécessitent des antennes certes, mais plus on augmente la disponibilité des nouveaux téléphones captant Internet, nécessitant la 3 G, la 4 G… plus on aura besoin de nouvelles antennes toujours plus puissantes. La jeune génération se rue sur ces appareils qui sont disponibles quasiment gratuitement. Je considère qu’un appareil à 200 € est comme gratuit car son acheteur ne paie pas les coûts sociaux, écologiques et sanitaires que son téléphone va engendrer. Même si je sais que 200 € ça permet à certaines personnes de survivre quelques jours. Peu de personnes sont en capacité de refuser cette innovation technologique à bas prix ! Le jour où une antenne s’implante devant sa fenêtre, on voit le téléphone (des autres) autrement !
– Wil C : sans parler de la manière dont sont fabriqués et recyclés ces téléphones portables.
– Stéphane P : la problématique que nous rencontrons vient de la spécialisation que nous avons, et dont nous avons besoin pour être efficace au sein de nos collectifs, mais qui engendre aussi une forme d’ignorance des combats des autres. Nous sommes plus ou moins solidaires, mais en creusant on s’aperçoit de l’impact de chaque problème. Quand on s’en aperçoit, là on devient sensibilisé. Par exemple, le projet d’autoroute dans le sud du département, je ne le connais pas bien. Si nous pouvions renouveler ce style de rencontre, où, à chaque fois, les collectifs expliquent leurs luttes et leur actualité nous permettrait de vivre mieux l’information, de mieux saisir les enjeux.
– Daniel : il y aura toujours des gens pour bondir sur les nouveaux gadgets. C’est donc à la société de réfléchir à ce qui est utile pour la société et ce qui est superflu. Et de les interdire.
– Patrice K : serait-ce la preuve de notre incapacité à la responsabilité ? Toujours infantilisé.
– une participante anonyme : le déni aussi est important. Quand je parle autour de moi et que j’essaie d’informer des dangers du téléphone portable, de la voiture… On me répond souvent « oh ne me parle pas de ça ! ». Beaucoup de gens ne veulent pas savoir !
Patrice K & Wil C
* Les collectifs invités absents sont : Pur Burg contre une unité de traitement de boues d’épuration à Paulinet, Ambres patrimoine contre un projet de Gravière, Le collectif Rieudas opposé au projet de ZAC des portes du Tarn.