Qui nie le vent sème la tempête

DES_MA1-300x300Gérard BASTIDE, les lecteurs de Confluences 81 le connaissent bien, ainsi que ses articles et ses dessins. Maire adjoint de Labastide-Rouairoux, vice-président du Parc Régional du Haut-Languedoc, il fait ici le point sur la “crise” qui agite, depuis quelques mois, cette collectivité. 

Pour compléter et permettre une meilleure compréhension du sujet, nous faisons suivre cet article par un compte-rendu d’une réunion organisée sur le sujet par Sortir du Nucléaire Tarn. 

A ceux qui seraient tentés de croire à la mort annoncée du Parc, je suis heureux d’affirmer que le rapport d’autopsie n’est pas pour demain, que le Parc du Haut-Languedoc fêtera l’an prochain ses 40 ans, qu’il se porte plutôt bien et vient de faire l’objet d’un quasi-plébiscite : Après 3 ans d’élaboration, des centaines de réunions,  119 communes sur les 121 du périmètre d’étude ont approuvé la nouvelle charte, 19 communautés de communes, com d’agglo et autres conseils généraux. Sur 20. Un quasi-plébiscite. Où est donc le problème ?

C’est que le conseil municipal de Mazamet a décidé d’émettre des réserves dans sa délib, ce qui vaut avis négatif et la commune de Lacabarède lui a emboité le pas. Dans la foulée, le Maire de Castres, président de la com d’agglo a aussi émis un vote négatif à une très courte majorité, déjugeant ainsi les 10 communes de son territoire qui avaient voté favorablement et excluant de fait les 9 communes à l’ouest pour cause de discontinuité territoriale. Vous suivez ?

La raison la plus audible invoquée par Mazamet est la préservation de paysages saccagés par l’éolien industriel. Intégrisme étonnant de la part d’une ville qui a laissé faire pendant des décennies une pollution majeure du Thoré et de ses affluents. L’occasion de rappeler que si le Parc instruit les dossiers éoliens, c’est dans le strict cadre de ses compétences et qu’il n’est en rien prescripteur, la décision appartenant au Préfet. Il est cocasse de noter que si pour certains, le Parc apparait vendu aux  promoteurs éoliens, ailleurs il est taxé d’anti-éolien quand il se prononce contre certains projets !

Au contraire, le projet de charte dit noir sur blanc le souhait de tous de voir ces  technologies (éolien, photovoltaïque, hydraulique…)  rigoureusement encadrées au profit des économies d’énergie et de l’exploitation des ressources locales (biomasse, méthanisation…)

Mais il serait naïf de croire  que ce sont les machines à vent qui ont mis le feu au sud-Tarn. En réalité, les anti-éoliens sincères (dont la réfutation des motivations mériterait, à elle seule, un autre article) se sont retrouvés instrumentalisés dans un jeu où les considérations environnementales pèsent de bien peu de poids face à des enjeux politiques d’un tout autre niveau. Le problème, c’est que le sud Tarn se serait bien passé de ce tsunami politique…et que l’obtention du précieux label Parc sera retardée encore de plusieurs mois.

Gérard Bastide, 
vice-président du Parc naturel régional du Haut-Languedoc


Le mardi 19 juin 2012, à l’invitation du collectif “Sortir Du Nucléaire Tarn, Promouvoir les énergies renouvelables, la sobriété et l’efficacité énergétique”, Gérard Bastide, élu “Vert”, vice président du Parc Naturel régional du Haut Languedoc et adjoint à la culture de la commune de Labastide Rouairoux, nous a fait le plaisir de venir nous renseigner sur la nouvelle charte du Parc Naturel régional du Haut Languedoc tant décriée par les adversaires des éoliennes “industrielles” .

Qu’est-ce qu’un parc Naturel Régional ?

Contrairement à un Parc National, qui est un sanctuaire de la nature (sans habitant), un Parc Régional Naturel est un lieu de vie (avec des habitant-e-s, des cultures, une économie…) dont on considère le patrimoine comme méritant d’être préservé et valorisé.

En 2013, le Parc Naturel Régional du Haut Languedoc aura 40 ans ! À cheval sur deux départements (le Tarn et l’Hérault), sur deux régions (Midi Pyrénées et Languedoc Roussillon), cette entité territoriale est régie par une charte valable 10 ans (sa validité passe à 12 ans désormais !). L’avant projet de charte a été accessible aux citoyen-ne-s ; seulement 600 personnes y ont contribué (mais pour cela fallait-il encore être informé !).

L’essentiel des critiques citoyennes s’est porté sur les limitations des véhicules motorisés dans les chemins forestiers et sur la présence d’éoliennes « industrielles » dans le Parc Naturel (avant la rédaction de la nouvelle charte, il y avait déjà 140 éoliennes « industrielles » dans le Parc).

Nouvelle Charte : seulement 2 communes (Mazamet et Lacabarède) sur 121 communes membres du Parc Naturel, ont émis des réserves à cette nouvelle charte, ce qui équivaut à un refus. Le nouveau code de l’Environnement demande aussi aux communautés d’agglomérations de se positionner. La communauté d’Agglomérations Castres-Mazamet rejette (à une légère majorité) la nouvelle charte du Parc. Ce qui entraîne un référé, en mai 2012, dont le résultat sera probablement connu à l’automne 2012.

Au final c’est le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN) qui accepte ou refuse la charte.

Devant le constat de la consommation énergétique du Parc Naturel (habitat, transport, industrie, agriculture…), 37 MW (plus élevée que la moyenne nationale), le volet « énergie » de la nouvelle charte prévoit 20% d’économie d’énergie, 20% de réduction des gaz à effet de serre et 20% d’énergies renouvelables en plus.

  • Sur les économies d’énergie :
    • Le Parc Naturel met en place auprès des jeunes : « je bouge pour ma planète »
    • Le Parc Naturel met en place auprès des agriculteurs : des bancs de contrôle des tracteurs (pour mieux régler les moteurs afin qu’ils consomment moins)**
    • Le Parc Naturel met en place des soirées Thermographie pour chercher « des passoires thermiques »
  • Sur le développement des énergies renouvelables :
    • Eoliens :
      C’est dans le cadre du développement des énergies renouvelables que se joue la friction avec les adversaires des éoliennes « industrielles ».
      La Parc Naturel n’est pas promoteur de parcs éoliens, il donne seulement un avis après étude d’impacts. C’est le préfet qui donne l’avis final. Par exemple, à Lacaze, le Parc Naturel a donné un avis défavorable sur un projet éolien.
      Pour la période 2011-2023 (période de validité de la nouvelle charte) le Parc se donne un plafond de 300 éoliennes (sans s’obliger à atteindre ce plafond), et refuse les éoliennes de plus de 125 m de haut en bout de pâles (ce qui est déjà énorme !).
    • Méthanisation :
      Développement de projets de méthanisation sur l’ère du Parc Naturel.
    • Photovoltaïque :
      Le parc tolère entre 10 et 12 projets (inférieurs à 40 ha)***
    • Hydroélectrique :
      L’hydroélectrique est déjà très bien développée sur le Parc Naturel. Les seules améliorations concerneront l’efficacité des moteurs.
    • Gaz & pétrole de schiste :
      Sur les gaz et pétrole de schiste, le Parc Naturel Régional a dit NON ! Il donne un avis négatif en cas d’exploration et d’exploitation. Mais il aura besoin de la mobilisation de ses habitant-e-s sans qui cette entité territoriale ne serait rien qu’une structure de bureaucrates !

En conclusion :

Sans une nouvelle charte rigoureuse, le Parc Naturel s’empêcherait de donner un avis consultatif sur les projets d’infrastructures prévus en son sein. L’avis du parc n’empêche nullement les mobilisations citoyennes… que j’encourage de mes vœux… mais émancipées des lobbys aux intérêts moins nobles que ceux des populations locales !

Merci à Gérard de nous avoir donné de son temps et de son énergie (propre et renouvelable) pour nous transmettre ces informations qui nous permettront sans doute de répondre aux rumeurs véhiculées…

Ce qui est en fait, un des rôles de l’élu-e… n’est-ce pas ?

 Pilar Pecket

 

* un extrait de ce compte-rendu a été envoyé au journal Confluence 81 pour qu’il s’en serve d’article si la place le lui permet. Ne soyez donc pas surpris-e-s !

** combien trouve-t-on de tracteurs dans le Parc Naturel si on compare aux camions, voitures, scooters, motocyclettes ? Fallait-il focaliser sur les quelques tracteurs ?

*** Avec toutes les toitures inclinées plein sud et vierges de photovoltaïque, il faut encore qu’on trouve le moyen de bâtir au sol…

publié dans Confluences 81, n° 96