Courrier à la Ministre des Transports

Le collectif PACT écrit à la Ministre des transports

Le quizz du moment. Qui a dit : « L’Etat privilégie les alternatives routières et ferroviaires », «  … On ne peut pas ignorer le prélèvement de terres agricoles, l’impact environnemental, … »,  « Le conseil d’orientation des infrastructures a recommandé de travailler plutôt sur des solutions alternatives routières et ferroviaires » ? Oui, c’est bien, Mme la Ministre des transports, à propos de l’abandon du projet d’autoroute A45. A-t-elle sciemment emprunté l’argumentaire du PACT depuis 10 ans ?

Car ici aussi, entre Castres et Toulouse, le PACT ne cesse de démontrer les nuisances du projet autoroutier A69 à péage : destructeur de terres agricoles, néfaste pour l’environnement, inacceptable pour le contribuable car financé à plus de la moitié grâce à une subvention de l’Etat et des collectivités territoriales, incompatible avec les besoins de déplacements au quotidien des usagers.

Les recommandations du Conseil d’orientation des infrastructures ne sont pas à géométrie variable, il serait donc incohérent que l’Etat rejette les alternatives routières au projet d’A69 alors même qu’elles apparaissent comme pertinentes pour l’A45.

Les arguments en faveur de ce choix sont en tous points présents dans les avis de l’Autorité environnementale (Ae) et du Commissariat Général à l’investissement (CGI) et sont sans équivoques. Ces deux instances mettent en doute l’intérêt socio-économique de cette infrastructure, ainsi que son adéquation au besoin, et recommandent que soit étudié l’Aménagement Sur Place (ASP) de la route nationale RN126 comme solution alternative au projet autoroutier, considérant que l’absence d’une telle étude constitue la faiblesse majeure du dossier soumis à l’Enquête Publique.

Il devient alors urgent, pour ne plus perdre de temps et pour que l’amélioration de cet itinéraire devienne une réalité, que le gouvernement, en cohérence avec le discours porté par la Ministre, abandonne le projet A69 et décide d’investir sur le réseau non concédé existant.

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Lettre ouverte à Madame la Ministre auprès du ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, chargée des Transports :

 

Le : 29 octobre 2018

Objet : Nécessité d’une étude alternative à l’A69

 

Madame la Ministre,

Vous avez déclaré le 17 octobre 2018 que le projet de l’autoroute A45 entre La Fouillouse et Brignais était abandonné et que « L’Etat privilégie les alternatives routières et ferroviaires à l’A45 ».

Vous avez précisé «  … On ne peut pas ignorer le prélèvement de terres agricoles, l’impact environnemental, … » et aussi « Le conseil d’orientation des infrastructures a recommandé de travailler plutôt sur des solutions alternatives routières et ferroviaires à l’A45. »

Le collectif PACT[1] (Pas d’Autoroute Castres – Toulouse) se réjouit de cette décision.

Il tient cependant à vous rappeler qu’ici, entre Castres (Tarn) et Toulouse (Haute-Garonne), le projet autoroutier A69 à péage est aussi destructeur de terres agricoles, néfaste pour l’environnement, inacceptable pour le contribuable car financé à plus de la moitié grâce à une subvention de l’Etat et des collectivités territoriales, et incompatible avec les besoins de déplacements au quotidien des usagers.

On ne peut donc que s’interroger sur l’incohérence de l’Etat à rejeter les alternatives routières au projet d’A69 alors même qu’elles apparaissent comme pertinentes pour l’A45.

Les recommandations du conseil d’orientation des infrastructures ne peuvent être à géométrie variable, pour décider pour l’un (A45), avec un même argumentaire, ce que l’on refuse obstinément à l’autre (A69).

Cette interrogation s’avère d’autant plus légitime quand nos arguments rejoignent en tous points ceux énoncés par les avis de l’Autorité environnementale (Ae) et du Commissariat Général à l’investissement (CGI), saisis par la DREAL Occitanie en juin 2016, dans le cadre de la procédure réglementaire de l’Enquête Publique sur le projet A69 d’autoroute concédée Castres – Toulouse.

Or, les conclusions de l’expertise de ces 2 instances sont sans équivoques. Elles mettent en doute l’intérêt socio-économique de cette infrastructure, ainsi que son adéquation au besoin, et recommandent que soit étudié l’Aménagement Sur Place (ASP) de la route nationale RN126 comme solution alternative au projet autoroutier, considérant que l’absence d’une telle étude constitue la faiblesse majeure du dossier soumis à l’Enquête Publique.

  1. Un projet dont la pertinence interroge

Cela fait onze ans que les associations et les communes opposées à ce projet, soucieuses elles aussi d’une liaison de qualité entre Castres et Toulouse, argumentent sur un quelconque intérêt général à une infrastructure qui mobilise indument toutes les énergies et les moyens des services de l’Etat pour parvenir au final selon le rapport de la Commission d’Enquête Publique, à « un bilan aussi négatif » et à « s’interroger sur la pertinence du projet ».

Ainsi en excluant, dès le Débat Public en 2009, toute solution alternative à la 2×2 voies par mise en concession de l’itinéraire Castres – Toulouse, le projet n’aura eu pour effet que de figer l’espérance d’une réalisation routière équitable socialement et territorialement.

Si l’Etat, se prévalait dans le dossier de Débat Public, d’avoir réalisé près de la moitié de cet itinéraire, il aurait été bien inspiré de se positionner alors sur l’accélération de l’aménagement sur place (ASP) de l’itinéraire Castres – Toulouse pour une réalisation sûrement plus rapide et d’un financement plus maitrisé que cette A69.

Il devient alors urgent, pour ne plus perdre de temps et pour que l’amélioration de cet itinéraire devienne une réalité, que le gouvernement, en cohérence avec le discours que vous avez porté à plusieurs reprises, abandonne le projet A69 et décide d’investir sur le réseau non concédé existant

  1. Un financement public inconsidéré

La rétrocession de 3 déviations de villages (Soual, Puylaurens et Verfeil) déjà financées sur fonds publics, une subvention d’équilibre toujours en hausse malgré son encadrement par la circulaire du 22 avril 2014 et un coût de réalisation toujours non maitrisé, nous permettent de nous interroger comme le CGI quant à la pertinence de ce projet quand il énonce : « On peut se demander si dans le cas de la liaison Castres Toulouse des investissements plus légers et mieux ciblés ne permettraient pas d’obtenir un résultat équivalent ».

Plus précisément, la subvention d’équilibre s’élève à 57% du coût du projet (P. 12 du rapport d’Enquête Publique) hors les apports en nature (déviations de Soual et de Puylaurens) chiffrés à 56,5M€.

A l’évidence des investissements plus légers et mieux ciblés, plus économes en foncier agricole, moins destructeurs sur le plan environnemental, plus responsables sur le plan sanitaire, plus adaptés aux besoins des usagers et plus cohérents pour un développement durable de nos territoires ruraux, permettraient non seulement des gains de temps et de confort à toute la population sud Tarn mais favoriseraient sûrement un développement économique plus harmonieux.

  1. Les petites communes rurales contraintes de financer une pré-étude des aménagements possibles de la RN126 !

Il est alors pour le moins remarquable de constater qu’en l’absence d’études alternatives à ce projet, et devant les refus répétés du maître d’ouvrage (MO), un nombre conséquent de communes et communautés de communes rurales impactées par le projet d’autoroute se trouvent dans l’obligation, en 2016, de financer sur leurs propres deniers, une pré-étude de l’ASP de la RN126, dans le but d’éclairer la Commission d’enquête, le public et les décideurs.

Plus précisément, cette pré-étude a été cofinancée par 16 communes sur les 24 concernées par l’autoroute – cela représente plus de la moitié de l’itinéraire ! – 2 communautés de communes[2], le Conseil départemental de Haute-Garonne, et la participation de la Région Occitanie.

  1. Un projet sans vision prospective qui pose une question de fond sur l’équité sociale.

« … puisque aucun acteur du monde politique ou économique n’a présenté de synthèse à même de justifier cette impérieuse nécessité … ». (P. 63 – Rapport d’Enquête Publique)

En effet, si dans le dossier d’Enquête Publique, le MO s’est trouvé très disert ou prolixe sur tous les éléments concernant les règles, les normes ou les réglementations concernant les aspects techniques du projet, il s’est montré par contre totalement muet sur la question de l’équité sociale de ce dernier : « La commission d’Enquête regrette que la réponse du porteur du projet se limite à une simple explication d’ordre administratif concernant le problème d’équité évoqué alors que ce dernier transcende cet aspect pour toucher au domaine sociétal ». (P. 85 – Rapport d’Enquête Publique)

C’est donc une infrastructure inadaptée, issue d’une initiative élaborée sans projet de territoire, facteur de dilapidation de l’espace et d’étalement urbain, organisant des dessertes plus longues et moins sécurisées pour une majorité d’usagers, avec un péage élevé (15€ A/R) profitant aux seules personnes disposant d’un salaire élevé, non pas un outil d’aménagement du territoire pour rendre le bassin sud Tarn plus attractif.

Penser que la réalisation de ce projet serait pour nos acteurs la solution miracle à tous leurs problèmes économiques est un leurre, alors qu’il ne peut être qu’une composante d’un plan de développement clairement défini et d’une vision prospective de la mise en valeur de leurs atouts ! (Cf. : conclusions et avis de la Commission d’Enquête Publique, page 6 et 7)

Enfin, au nom de quelle équité sociale et territoriale, pour un même département et deux bassins d’emplois quasi équivalents, est-il possible de faire converger vers un même lieu de péage celui de ‘L’Union’, deux autoroutes dont l’une l’A68 serait réputée la moins chère de France et l’autre, l’A69, réputée la plus chère ?

C’est pourquoi, sans attendre l’issue des trois recours[3] en annulation de la Déclaration d’Utilité Publique déposés concernant l’A69, nous vous demandons que, l’Etat abandonne le projet autoroutier concédé Castres – Toulouse et prenne la décision de privilégier les solutions routières alternatives et ferroviaires recommandé par vos instances gouvernementales.

Espérant avoir retenu toute votre attention et restant dans l’attente de vos décisions sur notre demande.

Nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre très haute considération.

 

Le collectif PACT

[1] Le collectif PACT regroupe des citoyens, associations, organisations politiques et syndicales.

[2] Communes : Appelle (81), Bannières (81), Cuq Toulza (81), Bonrepos-Riquet (31), Bourg Saint-Bernard (31), Le Faget (31), Francarville (31), Lacroisille (81), Loubens Lauragais (31), Maurens Scopont (81), Montcabrier (81), Saint-Pierre (31), Saussens (31), Teulat (81), Vendine (31), Verfeil (31)

Communautés de communes : Communauté de communes Cœur Lauragais (31),  Communauté de communes Coteaux du Girou (31)

[3] France Nature Environnement (FNE), Collectif des maires opposés au projet LACT, association La Coulée Verte